Page:Theuriet - Bigarreau, 1886.djvu/217

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Au sortir du verger, on déboucha sous une futaie de châtaigniers qui dévalait rapidement vers une longue nappe d’eau dont on apercevait le miroitement d’acier à travers les ramures.

« Ça, c’est le clou de notre promenade », dit Trémereuc en soutenant de son bras Pascaline, dont les pieds glissaient dans l’abrupt sentier en zigzag qui conduisait vers la berge, — « c’est l’étang de Morgrève. »

L’étang s’allongeait à perte de vue entre les deux pentes d’une gorge boisée. Sur les deux rives, les branches des hêtres et des châtaigniers trempaient dans l’eau brune semée de nénuphars. Des hirondelles, véloces comme des flèches, frisaient du bout de leur aile noire cette surface endormie. Tout au fond, dans une brume bleuâtre, un poudroiement de soleil entre les arbres criblait la nappe brune de paillettes argentées.

« Quel joli décor pour le quatrième de Hamlet ! » s’écria Pascaline en battant des mains.

Un canot était amarré à la berge. Jean y fit entrer la comédienne et godilla vigoureusement.

La rive opposée était plus abrupte encore que celle qu’ils venaient de quitter. Le sol boisé