Page:Theuriet - Bigarreau, 1886.djvu/246

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courage de m’éloigner d’un objet si cher à mon cœur, préférant ne plus vivre dans la ville où mon amie respire, que d’y languir sans l’espoir de la posséder. Lorsqu’une personne sûre vous remettra ce billet, je serai déjà loin. En quels lieux vous retrouverai-je, ô mon amie adorée, ou plutôt vous reverrai-je jamais ? Un pressentiment me dit que non. Maintenant qu’on m’arrache d’auprès de vous, je n’ai plus qu’un désir, m’arracher aussi de cette vie. Dans une époque aussi troublée que la nôtre, les occasions de mourir ne me manqueront pas. Mais, jusqu’à la mort, j’emporterai, ma chérie, le souvenir de cet amour à la fois vif et tendre, respectueux et fortuné, toujours fidèle et toujours nouveau, de ce véritable amour que m’inspirait et me rendait celle que j’adore. J’emporterai dans l’éternité la mémoire de ces doux moments où je pouvais vous presser contre mon cœur. Ah ! quels mois divins que ceux où, pendant tout le jour, nous jouissions du bonheur d’être ensemble ! Qu’elles étaient belles, ces journées obtenues après tant d’orages, et que tant d’orages vont suivre ! Ô jardin de Rembercourt, à jamais présent à ma pensée, tu ne me reverras plus ! Je vous laisse,