Page:Theuriet - Bigarreau, 1886.djvu/255

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piré une passion au beau jeune homme du portrait. — Elle s’aperçut de mon irrévérencieuse stupéfaction, mais loin de s’en offenser, elle reprit :

— Cela t’étonne ?… À ton âge, on croit volontiers que les vieux ont toujours été vieux… Mais il y a eu un temps où mes cheveux étaient bruns, où mes joues étaient roses et où j’avais vingt ans… Oui, c’était moi, continua-t-elle en soupirant, et tu comprends combien j’ai été navrée en découvrant qu’on avait fouillé dans cette cassette, pour y prendre un objet auquel j’attache tant de prix.

Je me confondis en excuses et je demandai de nouveau pardon.

— Va, tu es tout pardonné, dit-elle en m’interrompant affectueusement… Je suis trop heureuse de pouvoir enfin causer de mon cher Joseph avec quelqu’un qui s’est intéressé à lui. — Elle rougissait de nouveau, comme une jeune fille, tout en m’attirant, vers elle. — Vois-tu, il y a si longtemps que je garde toutes ces choses au fond de moi, sans oser en parler à ceux qui m’entourent ! Avec toi, je puis soulager mon cœur… Tu n’es plus un enfant, te voilà grand