Page:Theuriet - Bigarreau, 1886.djvu/277

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Cette date avait allumé toute une flambée de souvenirs d’enfance qui éclairaient joyeusement son cerveau. À cette clarté, il revit la vaste cheminée paternelle, égayée par les apprêts de la fête patronale ; il entendit la musique sautillante des violons, allant par les rues chercher les filles pour le bal annuel ; et il se rappela ses émotions du lendemain, quand il courait pieds nus pour tâter dans l’âtre ses sabots pleins de joujoux que saint Nicolas, sur son âne, avait apporté nuitamment par la cheminée.

— Donc, ce soir, continua avec volubilité la grand’mère, nous avons résolu de ne manger rien que des plats du pays. Le jardinier d’en bas nous a donné, en choux, navets et pommes de terre, de quoi faire une bonne potée ; j’ai acheté un saucisson de Lorraine, et quand vous êtes entré j’étais en train de préparer un tôt-fait.

— Oh ! un tôt-fait ! s’écria Boinville devenu plus expansif, voilà bien vingt ans que je n’ai entendu prononcer le nom de ce gâteau d’œufs, de lait et de farine, et plus longtemps encore que je n’y ai goûté…

Ses traits s’étaient animés et la jeune fille, qui