Page:Theuriet - Bigarreau, 1886.djvu/280

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prenait en secouant ses châtaignes : — Ce sera un maigre souper, mais un souper offert de bon cœur, et puis ça vous rappellera le pays, nomme ? (n’est-ce pas ?)

Claudette était remontée, rouge et un peu essoufflée ; la bonne dame apporta la potée fumante et embaumée et on se mit à table.

Entre cette brave octogénaire tout heureuse, et cette jeune fille si rieuse et si naturelle ; devant cette nappe qui fleurait l’iris, dans ce milieu quasi-campagnard, qui lui reparlait des choses du passé, Hubert Boinville fit honneur à la potée. Il se dégelait peu à peu et causait familièrement, s’amusant aux saillies de Claudette et riant d’un bon rire enfantin aux mots patois dont la grand’mère émaillait ses phrases. De temps en temps, la veuve se levait et allait à la cuisine surveiller son entremets. Enfin elle reparut, triomphante, tenant la cocotte de fonte, d’où s’élevait le tôt-fait avec des boursouflures brunes et dorées et une appétissante odeur de fleur d’oranger. Après, vinrent les châtaignes grillées au four et encore toutes craquantes dans leur écorce fendillée et rissolée. La vieille dame tira du fond de l’armoire une bouteille de fignolette,