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Page:Theuriet - Gertrude et Véronique, 1888, 4e mille.djvu/120

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— Mes peines !… Et qui donc au monde peut avoir souci de mes peines ?

Gertrude lui répondit évasivement que son bienfaiteur désirait ne pas être connu ; alors la malade ferma les yeux d’un air de fatigue et d’indifférence.

— Après tout, murmura-t-elle, que me fait son nom ?… Tout m’est égal pourvu qu’on sauve mon petiot… Moi, je suis lasse, oh ! lasse !…

Elle renversa son front sur le traversin et tomba dans une sorte de torpeur. Gertrude assise près d’elle contemplait ses mains décharnées, son visage aux pommettes saillantes, aux yeux caves, encadré et pâli encore par des flots de cheveux noirs. A l’aspect de cette figure ravagée par la misère et la maladie, la jeune fille fut prise d’une pitié profonde ; elle oubliait son isolement, ses craintes, ses souffrances, et, comparant sa vie à celle de cette malheureuse, elle ne se trouvait plus à plaindre… Au bout d’une demi-heure, la mère Surloppe revint avec les provisions, on alluma le poêle, on fit chauffer du bouillon pour la mère et du lait pour l’enfant, puis Gertrude reprit sa mante et sa capeline.

— Vous partez !… vous me laissez ? soupira la jeune femme en rouvrant les yeux.