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Page:Theuriet - Gertrude et Véronique, 1888, 4e mille.djvu/16

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— Tout beau, ma précieuse sœur, répliqua celui-ci en faisant résonner la crosse de son fusil sur les carreaux, Phanor n’est déplacé nulle part, il gagne sa journée, lui, et ne perd pas son temps à bayer aux corneilles !

Tout en parlant, le chasseur tira de son carnier deux vanneaux qu’il jeta sur la table : — Honorine, porte cela au garde-manger, et mets le couvert, car je meurs de faim.

Puis, d’un geste de maître, il frotta une allumette contre sa manche et alluma la lampe, objet de la contestation. L’apparition de la lumière rétablit le calme dans la salle. La veuve s’approcha avec son tricot, Reine reprit sa lecture, Honorine se mit à filtrer la liqueur qu’elle avait retirée du feu ; Xavier, seul, resta près de la croisée, le front appuyé contre la vitre et regardant la route déserte. Quant à Gaspard, après avoir débouclé ses guêtres, il avait pris un chiffon de laine et frottait le canon de son fusil en sifflant un air de chasse. La lueur de la lampe éclairait sa figure osseuse et hâlée, sa barbe touffue et ses yeux gris perçants. Personne ne parlait plus et le silence n’était interrompu que par le sifflet du chasseur, le balancier de l’horloge dans sa longue boîte, et les soupirs de l’épagneul qui s’était étendu près des chenets.