Page:Thevet - La France antarctique - Gaffarel, 1878.djvu/187

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fruitiers de soy mesme, sans planter ne cultiuer, qui apportent neantmoins leurs fruits aussi doux et plaisans à manger que si les arbres auoient esté entez. Car nous voyons par deça les fruits agrestes, c’est à sçauoir que la terre produit sans la diligence du laboureur, estre rudes, et d’un goust fort aspre et estrange, les autres au contraire. Donques en ceste Chicotin, isle se trouuent beaucoup de meilleurs fruits, qu’ê fru1t que nous terre ferme, encores qu’elle soit en mesme zone ou temperature : entre lesquels en y a un qu’ils nomment en leur langue Chicorin[1], et l’arbre qui le porte est semblable à un plumier d’Egypte ou Arabie, tant en hauteur que fueillages. Duquel fruit se voit par deça, que l’on amene par nauires, appellé en vulgaire noix d’Inde : que les marchants tiennent assez cheres, pource que outre les frais du voyage, elles sont fort belles et propres à faire yases : car le vin estant quelque temps en ces vaisseaux acquiert quelque chose de meilleur, pour l’odeur et fragrance de ce fruit, approchàt à l’odeur de nostre muscade. Diverses uiilitez de ce fruit. Ie diray dauantage que ceux qui boiuent coustumierement dedans (ainsi que m’a recité un Iuif, premier medecin du Bassa du grand Caire, lors que i’y estoye) sont preseruez du mal de teste et des flancs, et si prouoque l’urine : et à ce me persuade encores plus l’experiêce, maitresse de toutes choses, que i’en ay veue. Ce que n’a oblié Pline et autres, disans que

  1. Thevet parle ici du cocotier qui est en effet très abondant à Madagascar. Sur les propriétés de la noix de coco, consulter Flacourt. Ouv. cité. P. 127.