Page:Thevet - La France antarctique - Gaffarel, 1878.djvu/199

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quebuse, nous fumes d’auis d’entrer en cest endroit, et auec noz barques prendre terre : où incontinent les habitans nous receurent autant humainement qu’il fat possible : et comme estans aduertiz de nostre venue, auoyent dressé un beau palais à la coustume du païs, tapissé tout autour de belles fueilles d’arbres, et herbes odorifères, par une manière de congratulation, monstrâts de leur part grand signe de ioye, et nous inuitans à faire le semblable. Les plus vieux principalemêt, qui sont comme roys et gouuerneurs successiuemèt l’un après l’autre, nous venoyent voir et auec une admiration nous saluoyent à leur mode en leur langage : puis nous côduisoient au lieu qu’ils nous auoient préparé : Manihot racine de laquelle les Sauages usent et font farine. auquel lieu ils nous apporterent viures de tous costez, comme farine faite d’une racine qu’ils appellent manihot, et autres racines grosses et menues, très bonnes toutesfois et plaisantes à manger, et autres choses selon le païs : de maniere qu’estans arriuez, après auoir loué et remercié (côme le vray Chrestiê doit faire) celuy qui nous auoir pacifié la mer, les vents, bref, qui nous auoit donné tout moyen d’accôplir si beau voyage, ne fut question sinon se recréer et reposer sur l’herbe verte, ainsi que les Troïens après tant de naufrages et tempestes quand ils eurent rencontré ceste bonne dame Dido : mais Virgile dit qu’ils auoyent du bon vin vieil, et nous seulement de belle eau. France Antarctique. Apres auoir là seiourné l’espace de deux moys, et recherché tant en isles que terre ferme, fut nommé le païs loing à l’êtour par nous decouuert, France Antarctique, où ne se trouua lieu plus commode pour bastir et se fortifier qu’une