Page:Thevet - La France antarctique - Gaffarel, 1878.djvu/447

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iusques au bout de la queue, va tousiours en diminuant de grosseur : sa teste est côme celle d’un bœuf, vray est qu’il a le visage plus maigre, le menton plus charnu et plus gros, ses ïeux sont fort petis selon sa corpulence, qui est de dix pieds de grosseur, et vingt de longueur, sa peau grisatre, brochée de petit poil, autant espesse comme celle d’un bœuf, tellement que les gens du païs en font souliers à leur mode. Au reste ses pieds sont tous ronds, garnis chascun de quatre ongles assez longuets, ressemblans ceux d’un elephant. C’est le poisson le plus difforme, que lon ait gueres peu voir en ces païs là. Neantmoins la chair est merueilleusement bonne à manger, ayant plus le goust de chair de veau que de poisson. Les habitans de l’isle font grand amas de la gresse dudit poisson, à cause qu’elle est propre à leurs cuirs de cheures, de quoy ils font grand nombre de bons marroquins. Les esclaues noirs en frottent communement leurs corps, pour le rendre plus dispos et maniable, comme ceux d’Afrique font d’huile d’oliue. Pierres qui rompent le Calcule. Lon trouue certaines pierres dans la teste de ce poisson, desqueles ils font grade estime, pource qu’ils les ont esprouuées estre bones cotre le calcule[1], soit es reins ou à la vessie : car de certaine proprieté occulte, ceste pierre le comminüe et met en poudre. Les femelles de ce poisson rendent leurs petis tous vifs, sans

  1. Rochefort (Ouv. cité. P. 179) tout en constatant l’efficacité du remède, a grand soin d’ajouter : « à cause que ce remède est violent, on ne conseille à personne d’en useï. sans l’avis d’un sage et bien expérimenté medecin. »