Page:Thibaudet – Histoire de la littérature française.pdf/269

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les fragments épars de confessions, dont les exigences du genre oratoire n’éloignent qu’à regret Lacordaire.

Tout cela n’est pas une raison pour le relire beaucoup, trop lié à son temps et aux nécessités urgentes de l’action oratoire. Ses oraisons funèbres, ses hagiographies factices de Saint-Dominique et de Sainte-Madeleine, nous désignent, hélas ! les conventions comme le pôle opposé aux confessions, et qui les équilibre trop. Mais il a un don : celui des formules. Il est peu d’orateurs dont on puisse citer autant de phrases frappées en médaille, d’antithèses saisissantes et de définitions lumineuses.

Dupanloup.
Depuis ses catéchismes de la Madeleine vers 1840, jusqu’à sa présence et sa prestance sur la brèche au temps du Seize Mai, Dupanloup est resté la plus grande figure du clergé français et, digne d’être peint par Rigaud, le Bossuet du XIXe siècle. Mais jusqu’au génie littéraire exclusivement. Son œuvre n’est indispensable qu’à l’historien de l’Église. On fera exception peut-être pour ses trois volumes sur l’éducation, qui tiennent une place éminente dans la riche littérature de la psychologie catholique, mais surtout pour les fragments publiés de son Journal intime. Ce Journal, dont il faut souhaiter la publication intégrale, cet entretien quotidien d’un grand homme d’action avec lui-même et avec Dieu, est un livre unique dans la littérature cléricale : une grande intelligence et une grande vie d’action y prennent leur source dans une fontaine secrète, qui est à la mesure d’un visage humain.