Page:Thibaudet – Trente ans de vie française – Volume I.djvu/205

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M. Maurras avec un grand esprit architectonique de décision et de hardiesse, à la suite d’Auguste Comte, sur un champ de raison méridionale. Un catholicisme du dehors se développe comme un automne paradoxal et pur, comme un été de la Saint-Martin après le grand été catholique, total, mûrissant et fécond. Il le suit, et paraît attendre le moment où il ira s’asseoir, sur un tombeau, dans une attitude pensive et plastique de génie héroïsé. Comme le système de Comte était une grande création de logique historique nue, celui-ci dessine une figure de logique infléchie, assouplie et humaine. Il devait séduire un esprit sensible à la volupté de tenter « quelque chose de difficile, mais de grand », un Athénien qui trouve le chef-d’œuvre de l’art dans la fusion de deux idées opposées, là-bas ionique et dorique, ici païenne et catholique. On se laisse aller à l’admiration ou l’on demeure sur la réserve selon que l’on est sensible soit au goût des belles choses réalisant pour l’esprit « la plénitude de leur type » soit à la situation délicate de l’Église de France, qui, pareille à une forêt frappée et brûlée, aurait besoin, pour se refaire, non pas qu’on y traçât des routes romaines et royales, mais qu’on lui laissât d’abord du silence et du repos.