regarde la discipline publique. Quant à la discipline privée, M. Maurras attache-t-il de l’importance à des fantaisies candides comme celles du bon Théo, Fortunio et Mademoiselle de Maupin ? Les romantiques anglais, Byron et Shelley, ont ici un autre tempérament et une autre envergure. Qu’on se souvienne de la place que tiennent le sentiment et l’apologie de la vie de famille chez Lamartine et chez Hugo. Chez Musset comme chez Baudelaire, la débauche s’accompagne presque toujours de mauvaise conscience, et l’âme la déteste quand la chair faible y cède. La patrie ? N’est-ce pas du romantisme qu’est né en France le grand lyrisme patriotique, celui de l’ode nationale à la Hugo, qui a ajouté sa quatrième corde, la plus sonore, au discours de Ronsard, au poème officiel de Malherbe, à la tragédie cornélienne ? La propriété ? Quel écrivain romantique a donc attaqué formellement le principe de la propriété individuelle ? « Cette malle doit être à lui », murmure, du romantisme, M. Maurras devant la malle barbue de 1848. Ainsi le Dauphin, fils de Louis XV, à qui son précepteur énumérait les crimes de Néron lui demanda : « Ne pensez-vous pas qu’un pareil coquin devait être janséniste ? »
N’exagérons d’ailleurs, à notre tour, rien. Il n’est pas de groupe littéraire un peu complexe où toutes les tendances de l’ordre politique et social ne soient représentées. Exclurons-nous, par exemple, du classicisme Fénelon que Louis XIV appelait le bel-esprit le plus chimérique de son royaume ? — Il y a tout de même, tant dans le romantisme que dans le contre-romantisme, son frère ennemi, des éléments de source et de tendance révolutionnaires, ou du moins nettement adverses de ceux qu’approuve et adopte la pensée de M. Maurras. Mais il semble que, parmi les romantiques et leurs voisins, M. Maurras dénonce avec le plus d’âpreté ceux-là même auxquels, peut-être, il doit le plus, et que cet enfant dru et fort réserve à sa nourrice ses plus vigoureux coups de poing.
Voici. La doctrine politique de M. Maurras est le nationalisme intégral, qui comporte d’abord un élément de raison et de volonté : tout subordonner au salut public, en définir les conditions et les réaliser par tous les moyens ; — ensuite un élément de sensibilité : se sentir Français par toutes ses racines et ses fibres, Français de son pays et de son terroir, fruit d’un arbre, d’une tradition, d’un ciel, attaché à sa grande patrie par l’intermédiaire nécessaire de sa petite patrie. Si, par le premier côté, M. Maurras procède de maîtres politiques, par le second il est un fils spirituel de Mistral et un frère de M. Barrès. Mais