Page:Thiers - Histoire du Consulat et de l’Empire, tome 12.djvu/12

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ou moins habile à peindre, mais plus calme, plus discret, pénètre d’un œil auquel rien n’échappe dans la profondeur des événements humains, et les éclaire d’une éternelle clarté. De quelque manière qu’ils fassent, je le répète, ils ont bien fait. Et pourtant n’y a-t-il pas une qualité essentielle, préférable à toutes les autres, qui doit distinguer l’historien, et qui constitue sa véritable supériorité ? Je le crois, et je dis tout de suite que, dans mon opinion, cette qualité c’est l’intelligence.

Je prends ici ce mot dans son acception vulgaire, et l’appliquant seulement aux sujets les plus divers, je vais tâcher de me faire entendre. On remarque souvent chez un enfant, un ouvrier, un homme d’État, quelque chose qu’on ne qualifie pas d’abord du nom d’esprit, parce que le brillant y manque, mais qu’on appelle l’intelligence, parce que celui qui en paraît doué saisit sur-le-champ ce qu’on lui dit, voit, entend à demi-mot, comprend s’il est enfant ce qu’on lui enseigne, s’il est ouvrier l’œuvre qu’on lui donne à exécuter, s’il est homme d’État les événements, leurs causes, leurs conséquences, devine les caractères, leurs penchants, la conduite qu’il faut en attendre, et n’est surpris, embarrassé de rien, quoique souvent affligé de tout. C’est là ce qui s’appelle l’intelligence, et bientôt, à la pratique, cette simple qualité, qui ne vise pas à l’effet, est de plus