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Page:Thiers Adolphe - Histoire de la Révolution française t1 (1839).pdf/37

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RÈGNE DE LOUIS XVI.

été pour Turgot : les parlemens, instruits de ses projets, se réunirent contre lui, et l’obligèrent à se retirer.

La conviction des abus était universelle ; on en convenait partout ; le roi le savait et en souffrait cruellement. Les courtisans qui jouissaient de ces abus, auraient voulu voir finir les embarras du trésor, mais sans qu’il leur en coûtât un seul sacrifice. Ils dissertaient à la cour, et débitaient des maximes philosophiques ; ils s’apitoyaient à la chasse sur les vexations exercées à l’égard du laboureur ; on les avait même vus applaudir à l’affranchissement des Américains, et recevoir avec honneur les jeunes Français qui revenaient du Nouveau-Monde. Les parlemens invoquaient aussi l’intérêt du peuple, alléguaient avec hauteur les souffrances du pauvre, et cependant s’opposaient à l’égale répartition de l’impôt ainsi qu’à l’abolition des restes de la barbarie féodale. Tous parlaient du bien public, peu le voulaient ; et le peuple, ne démêlant pas bien encore ses vrais amis, applaudissait tous ceux qui résistaient au pouvoir, son ennemi le plus apparent.

En écartant Turgot et Necker, on n’avait pas changé l’état des choses ; la détresse du trésor était la même : on aurait consenti long-temps encore à se passer de l’intervention de la nation, mais il fallait exister, il fallait fournir aux prodigalités de la cour. La difficulté écartée un moment par la destitution