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Page:Thiers Adolphe - Histoire de la Révolution française t1 (1839).pdf/410

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là que donner au papier les fonctions de monnaie, en le rendant, comme l'autre monnaie, intermédiaire entre tous les objets d'échange, c'est changer la quantité reconnue pour unité, autrement appelée dans cette matière l'étalon de la monnaie ; c'est opérer en un moment ce que les siècles opèrent à peine dans un état qui s'enrichit ; et si, pour emprunter l'expression d'un savant étranger, la monnaie fait à l'égard du prix des choses la même fonction que les degrés, minutes et secondes à l'égard des angles, ou les échelles à l'égard des cartes géographiques ou plans quelconques, je demande ce qui doit résulter de cette altération dans la mesure commune. »

Après avoir montré ce qu'était la monnaie nouvelle, M. de Talleyrand prédit avec une singulière précision la confusion qui en résulterait dans les transactions privées :

« Mais enfin suivons les assignats dans leur marche, et voyons quelle route ils auront à parcourir. Il faudra donc que le créancier remboursé achète des domaines avec des assignats, ou qu'il les garde, ou qu'il les emploie à d'autres acquisitions. S'il achète des domaines, alors votre but sera rempli : je m'applaudirai avec vous de la création des assignats, parce qu'ils ne seront pas disséminés dans la circulation, parce qu'enfin ils n'auront fait que ce que je vous propose de donner aux créances publiques, la faculté d'être échangées contre les domaines publics. Mais si ce créancier défiant préfère de perdre des intérêts en conservant un titre inactif : mais s'il convertit des assignats en métaux pour les enfouir, ou en effets sur l'étranger pour les transporter ; mais si ces dernières classes sont beaucoup plus nombreuses que la première ; si, en un mot, les assignats s'arrêtent log-temps dans la circulation avant de venir s'anéantir dans la caisse de l'extraordinaire ; s'ils parviennent forcément et séjournent dans les mains d'hommes obligés de les recevoir au