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Page:Thiers Adolphe - Histoire de la Révolution française t1 (1839).pdf/419

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silence au roi, qui le garda jusqu'à son arrivée à Paris. Pétion tenait dans ses genoux le petit Dauphin ; il se plaisait à rouler dans ses doigts les beaux cheveux blonds de l'intéressant enfant ; et parlant avec action, il tirait ses boucles assez fort pour le faire crier… « Donnez-moi mon fils, lui dit la reine ; il est accoutumé à des soins, à des égards qui le disposent peu à tant de familiarités. »

« Le chevalier de Dampierre avait été tué près de la voiture du roi, en sortant de Varennes. Un pauvre curé de village, à quelques lieues de l'endroit où ce crime venait d'être commis, eut l'imprudence de s'approcher pour parler au roi ; les cannibales qui environnaient la voiture se jettent sur lui. « Tigres, leur cria Barnave, avez-vous cessé d'être Français ? Nation de braves, êtes-vous devenus un peuple d'assassins ?  » Ces seules paroles sauvèrent d'une mort certaine le curé déjà terrassé. Barnave, en les prononçant, s'était jeté presque hors de la portière, et madame Élisabeth, touchée de ce noble élan, le retenait par son habit. La reine disait, en parlant de cet événement, que dans les momens des plus grandes crises, les contrastes bizarres la frappaient toujours ; et que, dans cette circonstance, la pieuse Élisabeth retenant Barnave par le pan de son habit, lui avait paru la chose la plus surprenante. Ce député avait éprouvé un autre genre d'étonnement. Les dissertations de madame Élisabeth sur la situation de la France, son éloquence douce et persuasive, la noble simplicité avec laquelle elle entretenait Barnave, sans s'écarter en rien de sa dignité, tout lui parut céleste dans cette divine princesse, et son cœur disposé sans doute à de nobles sentimens, s'il n'eût pas suivi le chemin de l'erreur, fut soumis par la plus touchante admiration. La conduite des deux députés fit connaître à la reine la séparation to-