Page:Thiers Adolphe - Histoire de la Révolution française t1 (1839).pdf/425

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discrétion pouvait réveiller la fureur du peuple. Tous les membres du côté droit se turent, et ceux du côté gauche laissèrent à leurs chefs la proposition des mesures qu'ils appelèrent de sûreté, et qui ne furent contredites par personne. Le second jour du départ, les jacobins devinrent menaçans, et les constitutionnels modérés. Ils étaient alors et ils sont encore bien plus nombreux que les jacobins. Ils parlèrent d'accommodement, de députation au roi. Deux d'entre eux proposèrent à M. Malouet des conférences qui devaient s'ouvrir le lendemain : mais on apprit l'arrestation du roi, et il n'en fut plus question. Cependant leurs opinions s'étant manifestées, ils se virent par là même séparés plus que jamais des enragés. Le retour de Barnave, le respect qu'il avait témoigné au roi et à la reine, tandis que le féroce Pétion insultait à leurs malheurs, la reconnaissance que leurs majestés marquèrent à Barnave, ont changé en quelque sorte le cœur de ce jeune homme, jusqu'alors impitoyable. C'est, comme vous savez, le plus capable et un des plus influens de son parti. Il avait donc rallié à lui les quatre cinquièmes du côté gauche, non seulement pour sauver le roi de la fureur des jacobins, mais pour lui rendre une partie de son autorité et lui donner aussi les moyens de se défendre à l'avenir, en se tenant dans la ligne constitutionnelle. Quand à cette dernière partie du plan de Barnave, il n'y avait dans le secret que Lameth et Duport : car la tourbe constitutionnelle leur inspirait encore assez d'inquiétude pour qu'ils ne fussent sûrs de la majorité de l'assemblée qu'en comptant sur le côté droit : et ils croyaient pouvoir y compter, lorsque, dans la révision de leur constitution, ils donneraient plus de latitude à l'autorité royale.

« Tel était l'état des choses, lorsque je vous ai écrit. Mais, tout convaincu que je suis de la maladresse des