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de la présence de Dieu pour toujours ? N’est-il pas aisé, dis-je, de voir dans cette délivrance et le passage à la terre promise, le passage de l’état du péché, et par conséquent, de la damnation à l’état de la grâce et du salut ? De plus, si Dieu a exigé que son peuple mangeât une victime, un agneau, remarquez-le bien, pour perpétuer la mémoire d’une délivrance et d’un passage purement matériels, pourquoi vous est-il si difficile de croire que ce même Dieu ait voulu que les chrétiens mangeassent une victime correspondant à la dignité de celui qui, en mourant pour nous, a obtenu la délivrance de tous les hommes et leur passage du péché à l’état de la grâce ? Or, où trouver une victime digne de perpétuer sa mémoire ? Il n’y en avait pas, si ce n’est celle-là même qui s’est sacrifiée pour nous.

Le digne prêtre s’était tenu un peu en arrière depuis le commencement de cette discussion ; il s’approcha pour venir en aide à notre héros et lui dit en souriant :

— Très bien, jeune homme, Jésus-Christ a voulu perpétuer son sacrifice et son amour pour nous, en nous donnant l’Eucharistie, son corps à manger et son sang à boire. C’est pour cela que nous, prêtres, célébrons tous les jours cette mémoire en disant la messe, car le pain et le vin que nous tenons se trouvent, par les paroles de la consécration, changés au corps et au sang de notre divin Sauveur, et nous le donnons ensuite aux fidèles qui sont dignement préparés pour le recevoir.

— Oh ! la messe, dit M. Dumont avec ironie, encore une invention de Rome, un soi-disant sacrifice qui n’a pas sa raison d’être ; étant sans effusion de sang, il n’est d’aucune utilité. Vous devez savoir qu’il n’y a que le sang d’un Dieu qui puisse laver le péché.

— Je le sais, répond le prêtre, mais il y a une différence entre un sacrifice sans effusion de sang et un sacrifice non sanglant ; or, je dis que dans le sacrifice