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Page:Thomas - Gustave ou Un héros Canadien, 1901.djvu/358

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gustave

dans une de ces maisons qui vous sont consacrées, j’y passerai le reste de mes jours pour y chanter vos louanges et essayer d’imiter vos vertus. Ah ! je vous en supplie, ne rejetez pas mon humble prière, et prenez pitié de mon abandon. Mon Dieu, je pars d’ici en me confiant en votre bonté, je m’abandonne à votre protection. Soyez mon guide et mon appui.

Fortifiée par cette prière, Emily se lève et se dirige vers l’ouverture de la tente. En sortant, elle éprouve un moment de frayeur, mais ce n’est que pour un instant.

Craignant d’être vue, elle se baisse et se traîne plutôt qu’elle ne marche vers le feu que nous avons déjà vu. Le spectacle qui se présente à ses regards est propre à la glacer d’épouvante.

Tous ces sauvages, qui tantôt décidaient du sort de leur prisonnier, sont étendus ivres-morts, leurs figures sont horribles à voir, pas un d’entre eux ne donne le moindre signe de vie.

— Dieu me favorise, se dit-elle.

Quoiqu’elle puisse compter les battements de son cœur, et qu’elle tremble de tous ses membres, son courage ne la quitte point, elle avance toujours vers le prisonnier qui, les yeux fermés, ne prête aucune attention à ce qui se passe autour de lui.

Emily voit que le temps le plus critique est arrivé, le moindre bruit peut la trahir… elle s’arrête pour prendre haleine et tirer son poignard.

Au même instant, le prisonnier ouvre les yeux et regarde ses ennemis. Emily est en arrière de l’arbre auquel il est attaché et elle entend murmurer la prière suivante :

— Si vous le voulez, ô mon Dieu, votre ange viendra à mon secours.

De peur que la clarté du feu ne la trahisse, elle reste en arrière de l’arbre, avance le bras et cherche avec son poignard les mains du prisonnier pour couper les liens qui les retiennent. Ce dernier a refermé les yeux,