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Page:Thomas - Le roman de Tristan, par Bédier, Tome II, 1905.djvu/329

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LES PARTIES ANCIENNES DÜ ROMAN EN PROSE 323 4. — Le Morhoult.

Tristan 1 vint devant le roy Marc, son oncle, et lui pre- {f°33r*b) senta son service. Et le roy lui demande qui il est. « Sire », fait-il, « ung varlet estrange suy, qui vous servira, s’il vous plaist. — Il me plaist bien », fait le roy, « car tu me sembles bien gentilhomme. » Tristan demoure avec son oncle comme ung estrange bomme ; si fist tant en poy de terme qu’il ne oult en la court damoisel que on prisast une [maaille] 2 envers Tristan. Se Tristan va en bois ou il sert, il est prisié sus tous ses compaignons. Le roy ne veult aler sans lui nulle part. Tristan n’entreprent rien dont il [ne] vienne bien a chief et sagement pour son bel contenement et son bel service, ou tous les damoiseauix de la court ont envie sur lui, car tous sont arriéré mis pour lui. Tristan servi tant qu’il oult .xv. ans. Lors fu si preux et si fors que a nul ne fust de sa prouesse ne de sa vistesse. Gouvernai en est moult lié de ce qu’il est si creü et si amendé, car dès or mais en avant pourra il bien estre chevalier. Et, s’il [l1] estoit, il pourroit venir a grant chose. Ainsi comment je vous conte, advint, et trestout sans faillir, que a Pentree de may le Morhoult d’Irlande et grant gent avec lui vindrent en Cornouaille querre le treü que ceulx de Cornouaille devoient au roy d’Irlande. Et avoit avec le Morhoult entre les autres ung chevalier preux et vaillant, mais jenne estoit, (v*) et avoit nom Gahieret, et estoit compoings au Morhoult. Et a cellui temps avoit commencié a regner le roy Artus, mais il n’avoit encores gueres qu’il avoit esté couronné. Quant ceulx de Cornouaille entendent que ceulx d’Irlande estoient venus querre le treü, si commence le deul et le cry sus et jus. Le deul des dames et des chevaliers commence, et dient de leurs enfans : « Enffans, mal fussiez vous nez et 1. Après avoir été persécuté par sa marâtre et avoir rencontré diverses aventures à la cour du roi de Gaule, Pharamont (voyez ci-dessus, pp. 196, 199 et Lôseth, p. 18-19). 2. Ce mot est représenté par un sigle dans le manuscrit. a. ne.