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Page:Thomassy - Essai sur les ecrits politiques de Christine de Pisan.djvu/15

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soutenir, en tout six personnes à sa charge, et rien que sa plume pour assurer leur sort et le sien. Elle pourvut à toutes les nécessités du moment, sauva quelques débris de sa fortune ; et c’est alors qu’elle se dévoua au travail littéraire, comme d’autres se donnaient à la vie monastique.

Mais avant d’apprécier ses écrits, tâchons de comprendre son caractère. Ce qui la distingue du grand nombre de femmes célèbres que le moyen âge pourrait lui comparer, c’est l’énergie de la volonté, jointe à une exquise délicatesse de sentimens. Cette heureuse alliance de facultés qui s’excluent trop souvent, ne laisse à Christine aucune ressemblance avec les matrones de l’antiquité, et en fait à nos yeux un modèle parfait de la femme chrétienne. L’orgueil du stoïcisme, écueil des grands caractères et dernier appui des âmes peu religieuses qui ne veulent pas céder à leurs propres faiblesses, ne pénétra jamais dans son cœur. La confiance en Dieu l’occupait tout entier et en effaçait tout ce que l’isolement y aurait pu mettre de raide et d’inflexible. C’est ce qui nous explique comment Christine put être attendrie par le malheur, mais jamais humiliée par lui, encore moins désespérée ; comment elle put se montrer si ai-