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Page:Thomen - Les Aventures acrobatiques de Charlot — Charlot aviateur.djvu/32

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Un voyageur qui, seul dans-son-petit avion de tourisme, part de chez lui dans l’intention de faire le tour du monde, ne doit s’étonner de rien. On ne saurait cependant reprocher à Charlot la stupéfaction qu’il éprouva en faisant jaillir, du sol de l’île tropicale où il avait été contraint d’atterrir, une source d’excellente essence minérale. Il creusa un peu plus profondément et vit que cette source avait déjà été canalisée par la main de l’homme. « Hum… se dit Charlot, réfléchissons un peu à cela. » En même temps, il s’appuyait sur un palmier. Ayant posé son bras sur une basse branche de l’arbre, il sentit que celle-ci s’abaissait sous le poids. C’était une branche mobile… en métal. Elle était, en réalité, destinée à actionner le piston de la pompe à essence camouflée en palmier, Dans quel but, pour quels desseins cette installation ingénieuse ? Charlot ne chercha pas à deviner cette énigme. Il n’y vit qu’une chose : la possibilité de se ravitailler en carburant pour continuer son raid, Et le voilà pompant, pompant, jusqu’à ce que le réservoir du Crapaud-Volant fût plein.

Et puis, il s’envola, quittant sans regret cet îlot inhospitalier, auquel il devait cependant une fière chandelle. Deux minutes plus tard, il survolait une autre île, beaucoup plus grande et habitée celle-là — mais habitée par des locataires plutôt indésirables, à en juger par l’horrible scène qui se jouait sous les yeux de Charlot. Un homme blanc, ficelé à un totem faisant office de poteau de torture, servait de cible aux agaceries des sauvages qui gambadaient autour de lui en poussant des hurlements et en prononçant des phrases où il était question de la mort prochaine de l’infortuné prisonnier. Charlot aurait pu continuer sa route sans se mêler de cette affaire. Mais il aimait trop son prochain pour abandonner un de ses semblables à son malheureux sort, sans avoir essayé de lui porter secours. Il atterrit donc à un point de l’île très éloigné du lieu du supplice. L’endroit était planté de cocotiers chargés de fruits. Charlot grimpa dans ces arbres et fit une ample récolte de noix de coco, De ces noix, il remplit la carlingue de son avion. En outre, il constitua un dépôt de ces munitions, pour le cas où un second raid de bombardement serait nécessaire. Car c’était de cette manière qu’il comptait jouer son rôle de sauveteur. Donc, quand la carlingue fut pleine de projectiles, Charlot remit en marche et vint survoler le lieu du supplice. Et, en avant les noix de coco ! Pan ! sur ce roi des sauvages ! Pan ! sur son premier ministre. Pan ! sur le sorcier de la tribu. Il y en eut pour tout le monde. Et, de là-haut, malgré le bruit du moteur, Charlot entendait distinctement celui des noix de coco qui éclataient et de quelques crânes qui en faisaient autant.