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Page:Thomen - Les Aventures acrobatiques de Charlot — Charlot aviateur.djvu/33

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Son raid de bombardement terminé, Charlot s’empressa d’atterrir afin de se rendre compte du résultat. « Succès sur toute la ligne ! lui cria le prisonnier blanc. Tous les sauvages de cette île sont exterminés ! Aucune noix de coco n’a manqué son but ! Ah ! c’était du beau travail et je te bombarde à mon tour… Je te bombarde du titre d’« as » des bombardiers ! Et, tu sais, je m’y connais çar je suis de la partie, moi aussi. — Tu es aviateur ? Pilote breveté, six mille heures de vol, douze capotages, vingt blessures de guerre… Assez ! Ces titres sont plus que suffisants pour que je te nomme second pilote du Crapaud-Volant et premier observateur-navigateur de cet avion de grand raid. Naturellement, pendant ce petit colloque, Charlot ne perdait pas son temps et s’empressait de délivrer son nouvel ami, ficelé au totem servant de poteau de torture. Et, par manière de plaisanterie — car l’heure était vraiment à la joie — il se mit à sauter à la corde comme un gamin.

Et puis, tout à coup, la gaîté des deux blancs tomba. Un « Aââââh ! », sinistre ricanement, résonna désagréablement à leurs oreilles. « Qu’est-ce que c’est encore que ceux-là ? interrogea Charlot, à la vue d’une vingtaine de sauvages en armes qui venaient de surgir devant eux. — Ceux-là ? Connais pas ! Sans doute des naturels d’une île voisine qui viennent de débarquer… répondit Nestor (ainsi se nommait le nouvel ami de Charlot). — Qu’ils soient ce qu’ils voudront, vite à l’avion et débarrassons le plancher ! » commanda Charlot, Dix secondes plus tard le Crapaud-Volant décollait, dans un style impeccable. « Retournons d’où tu viens », conseilla Nestor. Charlot vola donc vers l’îlot où il avait fait son plein d’essence. Quand ils eurent atterri, Nestor dit à Charlot : « Je te dois quelques explications. Cette île minuscule est truquée comme un décor de théâtre. Elle sert de lieu de ravitaillement en essence à la Compagnie d’aviation qui m’emploie et j’en suis le gardien.

C’est ma curiosité qui a failli causer ma perte. Hier, je suis allé en pirogue visiter l’île où tu m’as trouvé. Par malheur, elle était habitée par les diables noirs que tu as vus prêts à me torturer. Sans toi, j’étais perdu, et je t’en dois une reconnaissance éternelle. Bien, dit Charlot, j’en suis ému, et l’émotion… ça creusé ! J’ai une faim de loup Et pas le moindre biscuit dans la carlingue du Crapaud-Volant ! — Qu’à cela ne tienne, vieux frère ! répondit Nestor. Tu penses bien que mes patrons ne m’ont pas laissé dans cette île perdue sans quelques provisions de bouche ! Vois plutôt ! » Nestor mena Charlot devant un gros arbre. Il ouvrit une porte ménagée dans le tronc de l’arbre qui était, à l’intérieur, aménagé en garde-manger bien garni. « C’est l’arbre-buffet ! » expliqua Nestor. Les deux blancs firent honneur aux provisions, Mais leur digestion fut coupée net par un spectacle désagréable. Deux pirogues armées en guerre et pleines de sauvages avançaient vers l’île à force de rames.