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AB AB 3

Abandonné, m. acut. Est de signification passive, celuy qui est mis par aucun en abandon, Desertus, Destitutus, Abdicatus.

Abandonné des medecins, A medicis deploratus.

Abandonnée, f. pen. Est aussi de signification passive. celle qui est mise en abandon, Destituta, Deserta, Exposita.

Celuy duquel la vie est abandonnée au premier qui le tuera, Proscriptus.

Une province abandonnée au pillage, Prouincia prædæ exposita.

Chose trop abandonnée, Res nimium deplorata.

Encores que toutes choses me fussent abandonnées et libres, Etsi omnia meæ potestati paterent, tamen, &c.

Abandonnement, m. acut. Delaissement, Desertio, Defectio, Destitutio, C’est abandon, Ainsi dit on Abandonnement de biens, pour la cession de biens que fait un debiteur à ses creanciers, qu’on pourroit aussi dire deguerpissement de biens, Bonorum abdicatio, Cessio bonorum.

Abandonnement de raison, Defectio a recta ratione.

Abandonnéement, adverb. Par, ou en abandon, Effrenatè, effusè, licenter, indulgenter, solutè.

Abastardir, acut. Est ores actif, et signifie mettre une chose hors de son naturel, et luy faire prendre estranges qualitez, comme, Il a abastardi les mœurs des bourgeois, Mores ciuium adulterauit, et par consequent signifie corrompre : il a tout abastardi, Omnia corrupit, Ores est reciproquant son action, comme, Le tyran s’abastardit tous les jours. Tyrannus se in dies in deterius efformat, degenerat, Ores est neutre, comme, Ceste plante abastardit d’un jour à l’autre, Haec planta quotidie in deterius vergit. Mais il semble plus tenir du passif, quoy que la terminaison soit autre, et seroit bien rendu par corrumpitur, adulteratur, et est composé de a, et bastardir, inusité.

Abbattre, act. penac. Est mettre par terre, ruer jus quelque chose, la faire cheoir ou trebucher de haut en bas, Decutere, Destruere, Deturbare, Prosternere, Euertere : il vient de Abbas, acut. adverbe local, composé de a et bas. Infra, si que Abbatre est mettre abbas, ou à bas.

Aisé à abbattre, Facilè decussu, deiectu, prostratu, La faim et la soif abbattent le corps, Fames et sitis corpus deprimunt.

Cela abbat l’yvresse d’une personne, et le desenyvre, Discutit ebrietatem hominis.

Vaincre quelqu’un et l’abbattre à ce qu’il soit des nostres, Euincere aliquem ac partium nostrarum efficere, Oratione aliquem a sententia deturbare.

Abbatement, m. acut. Deiectio, Prostratio, et se prend pour l’action d’abbattre, ou pour la chose abbatuë.

Abbatis, m. acut. Est la demolition et ruïne d’une chose cheute, comme, l’Abbatis d’une forest, Arbores caesae, reuulsae, prostratae, ligna humi deiecta, l’Abbatis d’une maison, Lapides, tigna, lateres domus quae corruit : on dit aussi en cas de guerre, Apres une bataille faire grand abbatis, Magnas strages edere.

Abbatu, m. acut. De signification passive, Deiectus, Prostratus, Depressus.

J’ay le cœur tout abbatu, Marcet animus, B. Afflicto sum animo ac deiecto.

Ils m’ont abbatu, Me labantem conuellerunt, B. ex Cic.

Abbay, m. acut. Est le japper d’un chien, ce qu’aucuns escrivent et prononcent par o, abboy, Latratus canis, Et semble que ce mot et sa suite soient derivez de ce verbe deponent Baubor, baubaris, qui signifie abbayer : ou plustost tant ce verbe Baubor, que ce mot Abbay et sa suite, sunt verba factitia a sono canis latrantis, voyez Rendre les Abbais.

Tenir aucun en abbay, Producere aliquem falsa spe.

Abbayer, act. acut. Latrare, Oblatrare.

Quand l’eau bat contre quelque rive, tellement qu’elle semble abbayer, Allatrant maria oram aliquam.

Abbayer à quelqu’un, Allatrare aliquem, C’est le poursuivre de paroles en criant apres luy.

Abbayement, m. acut. Latratus, us.

Abbayeur, m. acut. Latrator.

Abbayant, acut. Tantost est gerundif, comme, Tu me suis abbayant, ou en abbayant, Tu me oblatrando prosequeris, et en cette signification se devroit escrire par d à la fin, et tantost est nom, comme, Tu es un abbayant, Es oblatrator, et en cette signification se doit escrire par t, et est masculin.

Abbé, m. acut. Abbas Abbatis, Erasm. Est celuy qui est chef en une Abbaye de Moines, selon ce on dit l’Abbé de S. Denys. S. Dionysij coenobiarcha, antistes, Bud. et vient de Abba diction Syriaque, qui vaut autant que Pere.

L’Abbé mange en convent, Hetaeriarcha victitat cum sodalibus.

Abbesse, f. penac. Antistes, vel Antistita, B.

Abbaye, f. penac. Antistitium, Coenobiarchia, Haeteriarchia, Abbatia, Erasm.

Abbec, m. C’est la chair ou autre appast que les pescheurs mettent aux haims pour attirer et prendre le poisson, Esca.

Abbecher, acut. Composé de a et bec : C’est mettre au ou dans le bec


d’un oiseau, mais n’ayant encores l’adresse de becquer, Adescare, Inrostrare : et par metaphore Attirer quelqu’un à sa cordelle, Illicere, Inescare.

Abbeché, m. neut. Adescatus, Illectus, Inescatus.

Abbregé, m. acut. Il descend de ce verbe Abbreuiare. Dont aucuns prononcent Abbrevié, et est adjectif de signification passive, comme, Son propos est abbregé, Decurtata est illius oratio, Tantost est substantif, et signifie epitome et reduction sommaire, et un brief d’un escrit, Selon ce on dit, L’Abbregé des Chroniques de France, Annalium Franciae epitome, et tantost est chascune des trois personnes du temps preterit parfait, avec adjonction de ce verbe, ay, comme, J’ay abbregé, tu as abbregé, il a abbregé, Decurtaui, Decurtasti, Decurtauit.

Abbregé de quelque chose que ce soit, Summa, summae, Epitome, epitomes.

Ce sera le plus abbregé, Id erit compendiosius.

Abbreger, act. acut. C’est rendre bref et accourcir, Breuiare, Contrahere, Circuncidere quae ad rem non pertinent, B. ex Varrone, Aucuns prononcent Abbrevier.

Abbreger quelque chose, et la dire en peu de paroles, Perstringere rem aliquam, Circuncidere, In compendium conferre, Paucis eloqui.

Abbreger et accourcir son chemin, Iter contrahere.

Abbreger le temps, Tempus contrahere.

Pour abbreger, C’est par forme d’adverbe, In summa, Vt in pauca conferam, Ne multa, B. ex Cic.

Abbregement, m. acut. Compendium, Contractio, Comme abbregement de proces, Compendium, Contractio litium.

Abbreuver, acut. ou Abbruver, Tantost c’est donner à boire, faire boire, comme, Abbreuver les chevaux, Adaquare ; tantost faire tremper & emboire d’eau quelque chose, comme, Abreuver les tonneaux ou autre vaisseau, Aqua, aut liquore alio imbuere : Et en drap abbreuvé d’eau, c’est trempé & outré d’eau. Selon laquelle signification on dit par metaphore, Abbreuver aucun de quelque opinion ou persuasion, pour le remplir, imbuer & outrer de telle opinion ou persuasion, Totum occupare ac persuasum habere.

Abbreuver son esprit de quelque art, Ingenium artibus imbuere.

La terre n’est point abbreuvée de pluyes, ou mouillée, Terra pluuiis non immaduit.

Ils sont abbreuvez de cette opinion, Imbuit mentem eorum opinio, Inuasit illos hæc sententia.

Abbreuvoir, m. acut. Le lieu où on abbreuve les chevaux, Aquarium.

Mener à l’abbreuvoir, Appellere ad aquam, Adaquare equos.

Abecé, m. Abecedarium, Alphabetum, Tabula abecedaria, Libellus abecedarius. Ce mot est composé des trois premieres lettres Latines a b c, comme en Grec le nom d’Alphabet est composé des noms des deux premieres lettres Grecques, et signifie le denombrement par son et prolation (qui servent de nom à chaque lettre dudict Abecé) des lettres Latines, Abecedarium, aut Abecedarius libellus, car il se prend aussi pour ce petit livret à apprendre à lire aux enfants, où lesdites lettres Latines sont figurées et mises par estat et par ordre.

Apprendre son abecé, Discere elementa.

Enfant qui apprend son abecé, Abecedarius puer, Elementarius puer.

Abecedaire, com. gen. penac. Celuy ou celle qui apprend encore la forme ou figure et prononciation des lettres.

abbeville, C’est le nom d’une ville en Picardie, composé de ces deux mots, Abbé, et ville, Abbatis villa.

Abeille, f. penac. Est une espece de beste volatile du genre des Insectes, fort legere, d’aigre picquon, car de la picqueure de son aiguillon la chair s’en enleve tout autour, le propre de laquelle est faire le miel et la cire, pour laquelle raison nous l’appelons aussi mousche à miel. Apes, Lequel nom Latin luy est donné par ce qu’elle naist sans pieds. Mais ce mot François vient du Latin diminutif, Apicula, quoy qu’il ne soit diminutif en nostre langue, et ce par syncope de la voyelle v. mutation de c. en l, et de la muette p en sa moyenne b, duquel adoucissement des muettes dures en leurs moyennes, les François et Espagnols usent communément quand ils tirent leurs mots du Latin. Et par ce que cy apres cette ditte mutation et adoucissement seront marquez en mainte diction, afin qu’il ne le faille repeter ailleurs ; il convient noter que c, p, et t, sont de prolation roide, aspre et forte : mais g, b, et d, leurs moyennes sont de prolation molle et douce, laquelle nous et les Espagnols suyvons presque ordinairement és mots extraits du Latin, ce que l’Italien ne fait pas, car prenant d’iceluy Latin, il retient lesdittes muettes de fort et rude son.

Abhorrir, act. acut. Qu’on dit aussi Abhorrer, est avoir en horreur et detestation quelque chose, Abhorrere, et est composé ainsi que le Latin, mais horrer simple n’est en usage envers les François, combien que horrere le soit envers les Latins. Les deux viennent de ab et horror, signifiant le dernier une tremeur causée aussi de peur. Et par ce qu’on s’estrange de telles choses, abhorrer signifie aussi defuir et s’esloigner de quelque compagnie. Selon laquelle signification lon dit vne cho-


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