dre du temps, et si le vent ne les avait pas retenus. Les Athéniens, dès le point du jour, coururent en foule au Pirée, tirèrent les vaisseaux à flot, les montèrent tumultuairement et cinglèrent vers Salamine : ils laissèrent des gens de pied à la garde du Pirée. Les Péloponnésiens apprirent qu’il venait du secours, et après avoir fait des courses dans la plus grande partie du pays, ils prirent les hommes, le butin et les trois vaisseaux de la garnison de Boudore, et se hâtèrent de partir pour Nisée. Ils n’étaient pas sans crainte sur leurs propres vaisseaux, qu’ils avaient tirés du chantier, où ils étaient restés long-temps à sec, et qui faisaient eau de tous côtés. Retournés à Mégare, ils firent à pied le chemin de Corinthe, et les Athéniens revinrent aussi sur leurs pas, ne les ayant pas trouvés aux environs de Salamine. Depuis cet événement, ils gardèrent mieux le Pirée, tinrent le port fermé et prirent les autres précautions nécessaires.
XCV. Dans le même temps, au commencement de l’hiver, Sitalcès d’Odryse, fils de Térès, roi de Thrace, fit la guerre à Perdiccas, fils d’Alexandre, roi de Macédoine, et aux Chalcidiens de Thrace. Il s’agissait de deux promesses dont il voulait remplir l’une et faire exécuter l’autre. Perdiccas, se voyant pressé au commencement de la guerre, lui avait fait certaines promesses s’il le réconciliait avec les Athéniens, et s’il ne remettait pas sur le trône Philippe, son frère et son ennemi ; mais il ne les avait pas tenues, et lui-même était convenu avec les Athéniens, quand il était entré dans leur alliance, de mettre fin à la guerre de la Chalcidique. Ce fut pour ces deux objets qu’il se mit en campagne. Il conduisait avec lui, pour le mettre sur le trône, Amyntas, fils de Philippe. Agnon l’accompagnait en qualité de général : il avait aussi avec lui des députés d’Athènes qui se trouvaient pour cette affaire auprès de sa personne : car les Athéniens s’étaient engagés à fournir des vaisseaux et le plus grand nombre de troupes qu’il serait possible contre les Chalcidiens.
XCVI. Parti de chez les Odryses, il mit d’abord en mouvement les Thraces qui habitent entre les monts Æmus et Rhodope, et qui étaient sous sa domination jusqu’au Pont-Euxin et à l’Hellespont ; ensuite les Gètes qui vivent au-delà de l’Æmus, et tous les autres peuples qui habitent en deçà de l’Ister, dans le voisinage du Pont-Euxin. Les Gètes et les peuples de cette contrée limitrophe des Scythes, ont tous les mêmes armes, et sont tous archers à cheval. Il appela un grand nombre de montagnards libres de la Thrace ; ils portent des coutelas, et sont connus sous le nom de Diens : la plupart occupent le mont Rhodope. Il attira les uns par l’appât de la solde ; les autres le suivirent volontairement. Il fit aussi lever les Agrianes, les Léæens et toutes les autres nations de la Pœonie qu’il commandait. C’étaient les derniers peuples de sa domination qui s’étendait jusqu’aux Grains et aux Léæens de la Pœonie, et jusqu’au fleuve Strymon, qui, du mont Scomius, coule à travers le pays des Graærns et des Léæens. Tel était le terme de son empire du côté des Pœoniens, qui dès lors jouissaient de la liberté. Du côté des Triballes, qui vivent aussi sous leurs propres lois, sa domination était terminée par les Trères et les Lilatæens : ceux-ci logent au nord du mont Scomius, et s’étendent vers l’occident jusqu’au fleuve Oscius, qui tombe de la même montagne que le Nestus et l’Èbre ; elle est déserte et fort élevée, et tient au mont Rhodope.
XCVII. Le domaine des Odryses, du côté où il s’étend vers la mer, prend de la ville d’Abdères, jusqu’à l’embouchure de l’Ister dans le Pont-Euxin. Cette côte, en prenant le plus court sur un vaisseau rond, et avec le vent toujours en poupe, est de quatre journées et d’autant de nuits de navigation. Par terre, en suivant aussi le plus court, un homme qui marche bien peut faire en onze jours la route d’Abdères à l’Ister. La traversée du continent depuis Bysance jusqu’au pays des Léæens, est de treize jours pour un homme qui marche bien. C’est la plus grande largeur de ce pays en remontant depuis la mer. Le tribut des Barbares et des villes grecques, tel que le recevait Seuthès, qui à succédé à Sitalcès, et qui l’a augmenté, pouvait être estimé à quatre cents talens d’argent[1], en comptant ensemble l’argent et l’or. Les présens en or et en argent ne s’élevaient pas à moins, sans compter ce qui se recevait en étoffes pleines ou brodées, et en ustensiles de différentes espèces. Et ce n’é-
- ↑ Vingt-un millions six cent mille livres.