Page:Tinayre - Avant l amour.pdf/207

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
194
avant l’amour

prestige du mariage m’aveugla… Où était alors la fière, la tendre, la chaste Marianne qu’avait créée Rambert et que Rambert avait tuée ?… Je me soumis aux tristes nécessités du rôle que je jouais ; je fus la « demoiselle à marier », prête à toutes les compromissions, à toutes les comédies, à toutes les résignations… Ah ! l’horrible époque où sombrèrent peu à peu mes rêves et mes beaux orgueils d’adolescente ! Le sang me monte aux joues quand je remue ces souvenirs…

Et tant de calculs avilissants, tant d’humiliations subies, tant de révoltes comprimées ne devaient servir à rien. Ma pudeur se réveilla le jour où Montauzat voulut baiser mes lèvres. Il devina mes invincibles répugnances et pressentit un piège tendu… Peu après, nous apprîmes son mariage. Je n’eus pas à me consoler… Il me sembla que l’air et le soleil rentraient dans ma maison. Je détestai ma lâcheté, soulevée tout à coup d’une étrange allégresse…

— Qu’il se marie. Peu m’importe ! Ce dé-