Page:Tinayre - Gérard et Delphine - La Porte rouge.pdf/44

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comme tous les cadets de leur famille ; et, par delà les besoins et les intérêts matériels, les régions lumineuses où l’âme cherche le beau et le vrai.

« Si elle savait !… se dit-il. Moi, son frère, amant d’une femme mariée ! Elle tremblerait pour mon salut, ma pieuse Angélique ! Elle irait en pèlerinage à Saint-Amadour afin d’obtenir, ce qui me ferait plus de mal que la mort : la rupture de mes amours. Elle me dirait : « Tu as perdu la foi, à fréquenter les philosophes, et tu vas perdre l’honneur… »

Il parcourut la lettre où Mlle  de Sevestre lui annonçait les fiançailles de leur sœur cadette, Marie-Louise, surnommée « Mimi » ou « Petite ». Petite était promise au vicomte de Lastérac, « un honnête homme, vraie figure auvergnate, éclatante de santé ». Le ménage passerait les étés dans son château, les hivers à Riom, chez le président de Gourches, oncle et tuteur du fiancé. Ces hivers représentaient pour Petite une saison en paradis. Elle ne rêvait plus qu’aux fastes de Riom, et suppliait Gérard de lui envoyer la Gazette des Dames, avec les images en couleur. Elle voulait aussi qu’Angélique vînt à Riom. Mais Angélique était indispensable à Sevestre.

« Que ferait, sans moi, notre frère Junien, le plus têtu, le plus tatillon, le plus maussade des hommes, le plus paysan des seigneurs, le plus rude des chefs de famille, avec beaucoup de qualités, beaucoup de défauts, et pas un vice ? Que ferait ma belle-sœur Félicité, qui dort sa vie et