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Hellé

livres, on les appelle trouble-fêtes et perturbateurs.



NOUS TRAVERSIONS LE LUXEMBOURG…

Nous traversions le Luxembourg, Genesvrier toujours impassible, moi songeuse et frémissante. Il m’accompagna jusqu’à la maison et se retira.

J’étais un peu étonnée qu’il ne m’eût pas remerciée davantage, mais je commençais à comprendre cet homme singulier. Je sentais, par un obscur instinct, qu’il ne me prodiguerait jamais des éloges inutiles, mais que pas une de mes actions ne lui serait indifférente. Je lui devrais de connaître des aspects de la vie que ni mon oncle, ni madame Marboy, ni des savants comme Lampérier, ni des artistes comme Clairmont, n’auraient pu me révéler. Il m’avait intriguée d’abord, par son caractère, par ses idées, par son existence exceptionnelle ; il m’intéressait maintenant plus directement, comme un initiateur. En acceptant de le suivre auprès de sa protégée, j’avais tacitement promis de m’associer à ce que j’appelais encore une œuvre charitable, et c’était un lien — le premier — entre nous.

Le soir de ce même jour, je ne fus pas étonnée de le voir reparaître, sous un prétexte assez peu justifié. Une bizarre intuition m’avait avertie qu’il ne pourrait rester longtemps sans me revoir.

Notre vieil ami Lampérier l’avait précédé de quelques minutes à peine, et, pendant qu’il causait avec mon oncle, je me rapprochai du fauteuil de Genesvrier. Je