Page:Tinayre - L Amour qui pleure.djvu/139

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sous l’habile indulgence, sous la réelle compassion, ce même désir de revanche qui avait persisté, neuf ans, sous la résignation de l’épouse délaissée.

Pauline, cet être moyen, qui se vantait de rechercher le juste milieu en toutes choses, ne pouvait comprendre le sublime qui est, par définition, l’excès, le déraisonnable ! Son esprit utilitaire demeurait perplexe devant cette forme passionnée de la douleur qui se nourrit d’elle-même, sans jamais se rassasier… Elle croyait vaguement à un au delà possible ; mais, dans son cœur, les morts mouraient tout entiers. Exacte à parer leurs tombeaux, elle leur donnait un souvenir, à des dates déterminées, comme on fait des visites de politesse. Ils étaient véritablement hors de sa vie.

Elle ne doutait pas que Georges ne se consolât un jour. Elle le voyait, écrivant des opéras, voyageant, fréquentant le monde où, plus tard, il marierait sa fille. Sans doute, il n’oublierait pas Béatrice Alberi. Il lui garderait un coin de son cœur. Il penserait à elle, sans acre désespoir, avec une douceur