Page:Tinayre - L Amour qui pleure.djvu/265

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rien de la vie extérieure, ne révélant rien de la vie intérieure…

» Nous étions nés la même année, et dans la même région du Morvan. Mes parents habitaient la ville. Gérard et sa mère logeaient dans une vieille gentilhommière campagnarde, lézardée, moisie, pleine de chouettes et d’échos, compliquée de couloirs inutiles, d’escaliers qui ne menaient nulle part, de portes scellées dans le mur et qu’on n’avait pas ouvertes depuis quatre siècles. Il semblait qu’un seul coup de vent dût jeter bas cette bicoque. Elle durait pourtant, prise aux griffes velues d’un lierre noir, et portant de travers les deux chapeaux pointus de ses tourelles.

» Aux alentours, quelques prairies basses, une ferme et des forêts — des forêts compactes, bleuissantes, dont les remous nuancés couvraient les ondulations du sol, jusqu’à la plus haute vague montagneuse. Il y avait, dans ces forêts, une sorte de menhir, un rocher conique, debout sur sa pointe par miracle, masse énorme qui pouvait osciller un peu, sous un geste précis, et qu’on appelait la Pierre-qui-vire.