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Page:Tinayre - L Amour qui pleure.djvu/269

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» C’était la transition de l’hiver au printemps, la saison bizarre, inégale, aux cent caprices quotidiens, l’enfantine saison qui commence dès le premier perce-neige de février et s’achève dès la première violette de mars. Les touristes n’offensaient pas encore le beau pays de neige éclatante et de sombres sapinières, où le peuple souterrain des gnomes garde le secret des sources et des trésors. C’était la vieille Allemagne légendaire, l’Allemagne des frères Grimm… Et je croyais y rencontrer, partout, le bûcheron présomptueux, le hardi petit tailleur, le juif crochu et barbu des contes…

» J’avais l’âme disposée à la rêverie, et tendre comme un Lied de Schumann, le soir où j’entrai dans cette petite ville délicieuse qu’on appelle Fribourg-en-Brisgau… Le soleil déclinant empourprait la cathédrale de grès rouge qui se dessinait, puissante et légère, sur le fond boisé du Schlossberg. Le ciel riait entre les rosaces ajourées de l’énorme flèche, et les toits verts des très anciennes maisons luisaient comme des joujoux en faïence. Des frises peintes — ornements et fleurs — déco-