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Page:Tinayre - L Amour qui pleure.djvu/76

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nullement essentiels à son cœur, s’étaient affaiblis. C’est que Georges Clarence n’était pas de la race des époux et des pères. Il avait cru que le mariage et la paternité n’exigeaient pas une vocation spéciale, que tous les hommes en ont l’aptitude dès qu’ils en ont le désir. C’est une erreur assez commune, et fort excusable chez les êtres jeunes, que leurs parents et amis poussent au mariage, les yeux fermés. On admet, au nom de l’hygiène, que le même régime alimentaire et le même climat ne conviennent pas à tout le monde ; mais, au nom de la morale, on impose à tout le monde le même régime sentimental.

On a beaucoup raillé les « bourgeois » qui refusent leurs filles à des artistes et qui les donnent à des notaires. Ces bonnes gens n’ont pas tort. Ils devinent qu’une fille, élevée par eux, est plus propre au bonheur d’un notaire qu’à celui d’un artiste. Le mariage est fait pour la majorité des hommes ; plus l’artiste est artiste, plus il devient un être d’exception. Il appartient à la minorité des réfractaires et des libertaires, et, dans cette minorité, il doit chercher sa compagne. S’il ne la rencontre pas,