depuis le moyen âge, est le châtiment des maris orgueilleux, et qu’à la vue de tout Paris, et de tout Villefarge, il ne fût pas « cocu, recocu et surcocu ».
Avec le temps, la haine pour le gendre se transposa en haine pour la fille, et, sans renoncer à l’espoir de se venger de Lucien Alquier, Capdenat se surprit à lui accorder l’espèce de sympathie momentanée que nous inspirent les gens, même détestés, qui servent, à leur insu, nos rancunes.
Tous ces sentiments étaient à leur paroxysme, en ce moment où Geneviève, décidée à en finir, avait choisi et convoqué une gouvernante.
III
Un second coup de timbre. « Tac ! »
Maria-la-Bossue sort de son antre et va ouvrir la porte du palier. Est-ce le facteur, avec un télégramme ? Non, c’est une femme menue, en grand deuil, qui attend, le doigt touchant encore le timbre.
— Madame Alquier ?
— C’est ici.
— Je suis la personne qui vient de Figeac.
— La nouvelle bonne ?
La femme en deuil a un sursaut que la bossue ne remarque pas.
— Annoncez Mlle Vipreux, dit-elle, et sa voix impérative sonne clair et sec.
À ce moment, Geneviève paraît, au fond du couloir.
— Qu’est-ce que c’est, Maria ? Une dépêche ?
— Té ! c’est votre bonne, dit la bossue qui ne s’embarrasse pas à marquer les nuances et se hâte de regagner la cuisine.
Geneviève s’exclame joyeusement :
— Mademoiselle Vipreux ! Je ne vous espérais plus ! Je croyais que vous aviez manqué le train. Comment donc êtes-vous venue ?
— Madame avait tort de s’inquiéter. J’avais promis d’arriver aujourd’hui. Je n’ai qu’une parole… J’ai bien pris le train convenu, mais, à la gare, je n’ai pas vu l’auto…
— Quelle auto ?
— L’auto de Madame.
— Mon père n’a pas d’automobile, et la mienne est à Paris. Il fallait prendre l’autobus.
— Ah ! vraiment !… Je n’avais pas bien compris… Que Madame m’excuse !
— Vous avez fait le chemin à pied, en portant ce sac ! Comme vous devez être lasse !
— Très lasse, mais cela ne fait rien.
Pauvre Mlle Vipreux ! Geneviève l’admire d’être si courageuse et si patiente. Elle est recrue de fatigue et ne se plaint pas… « Cela ne fait rien ! »… Cela fait beaucoup à Mme Alquier, auteur responsable du malentendu. Elle s’excuse, s’informe hâtivement des circonstances du voyage et propose à Mlle Vipreux de la conduire à sa chambre.
— Ne dois-je pas saluer Monsieur ?
— Tout à l’heure. Nous avons à causer.