— Mais votre mari…
— C’est vrai, j’ai mon mari… Oh ! je suis très dévouée à mon mari… Je crois qu’il m’aime à sa manière… Mais nous vivons si peu ensemble… Est-ce qu’il a le temps de s’occuper de moi, mon mari ? Je ne lui reproche pas ses grands travaux, ses soucis politiques. Quand nous sommes ensemble, il est parfait pour moi… Vous n’allez pas croire que je n’aime pas mon mari ?
— Je crois M. Beauchamp très heureux…
— Vous voyez bien que tout est pour le mieux. Je vous répète que je suis très satisfaite de mon sort ; quelques bons amis, un piano, le violon de M. de Lauten, des fleurs partout… Ça suffit au bonheur de mon existence. Et ça sera toujours comme ça, j’espère, jusqu’à mes quatre-vingts ans.
— Vous êtes une jeune femme très raisonnable… et très raisonneuse. À votre place, je craindrais de manquer de philosophie. Le piano, le violon, les fleurs et même les bons amis, c’est charmant… Mais on s’en lasse… même avant quatre-vingts ans.
Elle haussa les épaules.