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Page:Tinayre - L Oiseau d orage.djvu/287

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de cœur, incapable d’aucune dépravation ; mais quand elle parlait de son amant, un feu étrange traversait ses vertes prunelles et je pensais avec un peu de gêne et de tristesse que les plus tendres éloquences de l’amour aboutissent toujours à cet uniforme, simple et éternel mode d’expression qui est l’étreinte…

Je ne voulais pas m’attarder aux images que cette certitude suscitait en moi. Je me rejetais dans mes souvenirs. Je rappelais l’ancienne ferveur de mon amitié, si chaste et si vive.

Mais j’avais beau faire : je revoyais toujours deux Hélènes distinctes, et si la dernière, la vraie, m’était chère encore, elle m’était chère autrement. Je la sentais plus proche de moi, pétrie de la même argile, femme simplement en face d’un homme qui pouvait la regarder en face, sans lever les yeux ni courber le genou.

Je ne sais si madame Beauchamp devinait le travail secret de mes pensées. Elle redoublait de sollicitude délicate et tâchait de montrer que rien en elle n’avait changé. Son esprit cultivé et