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Page:Tinayre - L Oiseau d orage.djvu/288

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fin, l’adorable bonté de son âme, enchantaient les heures que nous passions ensemble, mais, par moments, je devenais taciturne, presque amer. Ces trésors de son intelligence et de son cœur, ces grâces de sa personne, elle les avait prodigués à un autre, et la pensée des bonheurs exquis de leur intimité me donnait quelquefois une vague jalousie.

J’étais plus ému que jamais, à la fin d’une longue séance, vers les premiers jours d’avril. Des mois de surexcitation et de malaise avaient détraqué mes nerfs et ma volonté. L’air était si doux que j’avais ouvert la fenêtre. L’odeur du jardin, où les marronniers dépliaient leurs feuilles, nous apportait comme une promesse de printemps…

Je redoute ces heures troubles et charmantes, cette fièvre qui court dans la sève des arbres et les veines des hommes avant la grande débauche amoureuse de mai. Les premiers jours d’azur pâle et de soleil tiède, cette volupté éparse dans l’air, cette fermentation qui fait éclater les bourgeons aux pointes des branches, me