Page:Tinayre - La Douceur de vivre.djvu/184

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voisin, le peintre, recevoir les couleurs riantes de la vie, et que les brodeuses d’en face vêtiront de soie fleurie et dorée.

Salvatore s’arrêta chez les mouleurs qu’il connaissait particulièrement. Il affectait, par gentillesse, de les traiter en artistes, en confrères. Ces gens lui apprirent que le jeune Gennaro Cocumella avait délaissé le plâtre pour le commerce des ex-voto, — au bout de la rue, le cinquième magasin à gauche, chez don Pasquale di Rosa !

Salvatore et Marie continuèrent leur chemin, sous le feu croisé des regards qu’échangeaient les petites brodeuses, assises presque dans la rue, les teinturiers en fleurs accroupis sur le trottoir, lavant leurs mains violettes au ruisseau, les fleuristes qui assemblent ces fleurs teintes en bouquets et en couronnes. Le « magasin » de don Pasquale était un simple éventaire dans une sorte de renfoncement, près d’une imposante boutique où un homme hilare vendait des cercueils de toutes tailles, laqués de blanc, laqués de noir, dorés, argentés, avec de belles fleurs artificielles, des choux de tulle, des flots de rubans. De loin, à travers les vitres, on aurait dit des pianos et des petits meubles d’agrément chargés de corbeilles à l’occasion d’un mariage. Trois ou quatre de ces cercueils étaient posés dehors, dressés contre la muraille, pour engager