Aller au contenu

Page:Tinayre - La Douceur de vivre.djvu/185

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

la clientèle, et toute la population du quartier avait admiré la bière capitonnée en satin blanc, — un vrai nid de jeune mariée !… Seul, don Pasquale di Rosa était sincèrement attristé par ce mobilier funéraire qui faisait saillie sur le trottoir et dissimulait en partie son « magasin ». Les dévotes, en revenant de San Gregorio, dépassaient sans les apercevoir les chapelets en noyaux de dattes, les dizaines en mosaïque, les rosaires d’ambre et de corail teint, et la collection bien complète et vraiment élégante des ex-voto. Il y en avait pour tous les goûts, pour toutes les bourses, pour toutes les circonstances, en plâtre, en cire, en bois, en celluloïd, en métal argenté. Les dames stériles, qui avaient obtenu la fécondité, les mères, qui avaient voué un enfant malade à la Madone, pouvaient acquérir des poupons emmaillotés, sans bras, tout pareils à des larves de vers à soie, — ou à ces fromages de Caccio-Cavallo, d’un blanc jaune, étranglés par une ficelle qui leur fait une espèce de tête. Les infirmes, les malades guéris, trouvaient aisément la figuration en cire de l’organe préservé, grâce à l’intercession miraculeuse de la Madone du Carmel ou de la Madone du Rosaire, de sainte Agathe, de saint Cyr ou de saint Antoine. Et quel beau choix de nez, de bouches, d’oreilles détachées, de jambes avec ou sans cuisse, de