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Page:Tinayre - La Douceur de vivre.djvu/23

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André était trop jeune aussi, trop impatient, et peut-être trop égoïste pour accomplir la tâche parfois difficile d’une éducation amoureuse… À la fin de la première année, Marie devint enceinte. Sa grossesse fut très pénible et elle accoucha prématurément d’un enfant mort… Madame Wallers, qui était venue à Chantilly, ramena sa fille à Pont-sur Deule pour la distraire et la consoler. André Laubespin venait la voir tous les dimanches… Mais, entre-temps, il allait à Paris. Il continua d’y aller, seul, quand Marie fut rentrée chez elle. Il ne pouvait pleurer longtemps un être qui n’avait pas vécu ; il avait besoin de gaieté, de mouvement et de plaisir. S’ennuya-t-il de trouver à son foyer une femme toujours souffrante et endeuillée ? Comprit-il les différences essentielles de leurs caractères et de leurs tempéraments ? Sous prétexte de ménager Marie, il se détacha d’elle et se créa, au dehors, des intérêts, des habitudes, des liens qu’elle ignora longtemps. Marie n’était pas jalouse : elle concevait l’adultère comme une monstruosité, un crime répugnant qui devait être bien rare… Enfin, elle ne supposait pas qu’André pût lui mentir pendant des mois et des années, avec préméditation et sans remords. Jamais femme ne fut plus désarmée devant son mari, plus crédule, plus docile. Ses parents la croyaient heureuse ; elle-