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Page:Tinayre - La Maison du péché, 1902.djvu/221

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votre naissance !… Ah ! plus coupable que les autres, certes, et plus lâche, puisque vous étiez mieux défendu !… Votre éducation chrétienne vous avait prémuni contre les ruses du démon, et pourtant vous avez péché par orgueil et par complaisance ; vous avez joué une comédie sacrilège pour abuser un prêtre crédule et deux vieillards… Oui, je le sais, l’intention sauvait tout… Vous établissiez une casuistique à votre usage… Ce n’est point pécher que de pécher pour la plus grande gloire de Dieu. Celui-là est excusable qui brave la tentation et qui tombe dans l’impureté parce qu’il a essayé de sauver une âme… Étrange et commode maxime !… La religion devenait le prétexte dérisoire qui rassurait votre lâcheté. Vous déguisiez sous une apparence de zèle vos ignobles convoitises. Pharisien ! Croyez-vous qu’on puisse mentir à Dieu ?

Il ne répondait pas. Quel sophisme opposer à ces paroles ?… La sensation de cauchemar continuait. Où était-il ?… Quelles figures sombres l’épiaient, le long des murailles ? Une femme lui parlait, blême et terrible… Sa mère ?… Non, c’était sa Race, trahie par son péché, dressée devant lui pour le juger et le maudire. C’étaient les morts qui prenaient une forme et une voix, qui rappelaient leur exemple, l’exil accepté, la persécution subie, la mission sainte léguée de père en fils.

Il se tourna vers sa mère, et avec un accent d’humilité douloureuse :

— Je n’ai rien à dire… Je sais que vous êtes offensée, et Dieu plus que vous, hélas !… Je suis plus sévère pour moi que vous ne pouvez l’être… Mais