Page:Tinayre - La Maison du péché, 1902.djvu/352

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

crispait son visage, obscurcissait sa vue, alourdissait sa tête qui pencha peu à peu. Les mains ouvertes, le front appuyé au vitrage, les paupières closes et ruisselantes, elle resta sans mouvement, sans voix, anéantie.

Alors, M. Forgerus se leva, fort embarrassé de son personnage, et désireux de se retirer. Il dit doucement :

— Je respecte votre chagrin, madame… Mon pénible rôle est terminé… et ma présence ne peut que vous déplaire.

Fanny se redressa, l’air effrayé :

— Oh ! non, ne partez pas, monsieur… pas encore…

— Mais, madame…

— J’ai des choses à vous dire… des choses… C’est très confus dans ma tête, voyez-vous… Tout s’embrouille… J’ai reçu un tel coup !… Laissez-moi me remettre… comprendre… Oh ! monsieur, je vous en prie, ne vous en allez pas !… je vous en prie…

Où était la Furie, la Gorgone ?… C’était une pauvre femme, une pauvre enfant, effarée, pitoyable, qui implorait Forgerus.

— Vous m’écouterez, n’est-ce pas ?… Je vous ai dit, tout à l’heure, des paroles blessantes… des injures… Mais j’avais perdu le sens, monsieur… Depuis quelques jours… tant d’émotions !… La tête me tournait… Monsieur, vous êtes bon, vous êtes chrétien… Pardonnez-moi !… je regrette… Oui, maintenant, je regrette… Parce que, je le vois bien, tout dépend de vous… Si vous partiez, ce serait la fin, l’irrévocable… Et vous tenez ma vie dans vos mains, ma vie !…