Page:Tinayre - La Maison du péché, 1902.djvu/45

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
31
LA MAISON DU PÉCHÉ

de mécanique, mais il demeurait assez indifférent au progrèsrdes sciences, et peut-être, au fond du cœur, condamnait-il « cette recherche des secrets de la nature qui ne nous regarde point, dit Jansénius, qu’il est inutile de connaître, et que les hommes ne veulent savoir que pour les savoir seulement ».

Madame de Chanteprie avait approuvé le programme et la méthode du précepteur. Elle pensait que d’excellentes humanités, une forte éducation morale et religieuse, quelque teinture des sciences, suffisent à former un « honnête homme ». Augustin de Chanteprie n’était pas destiné à briller dans les salons. S’il n’avait pas la vocation sacerdotale, il resterait, comme son père et son grand-père, simple gentilhomme campagnard, occupé de travaux rustiques et de bonnes œuvres.

Deux fois par semaine, le dimanche et le jeudi matin, elle recevait M. Forgeras, et, tous les jours, à heure fixe, Augustin était admis près d’elle. L’enfant contemplait avec un sentiment de terreur et de respect la chambre pareille à une cellule, le Christ janséniste aux bras dressés, le mobilier misérable, et la femme presque toujours malade qui lisait des ouvrages pieux, et cousait pour les pauvres. Entre elle et lui, jamais de privautés, peu d’élan, peu de caresses. À peine osait-il lui parler… Et pourtant, Augustin, relégué au pavillon, regrettait sa mère. Il souffrait de ne plus vivre à l’ombre de sa robe, sous la bénédiction de ses mains, dans le grand silence qu’elle répandait autour d’elle. Il l’adorait. Elle était l’être vénérable, doux dans sa majesté, terrible dans sa douceur. Mère, Reine et par-dessus tout, Sainte !