Page:Tinayre - La Maison du péché, 1902.djvu/84

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— On m’a dit que vous vous intéressiez à la culture ?

M. de Chanteprie devina qu’il allait subir une espèce d’examen, et, résigné :

— Je m’en occupe par nécessité et par goût. Notre petite fortune est presque toute en terres que nous louons à des métayers. Je suis obligé de diriger un peu ces braves gens, fort routiniers et réfractaires aux beautés de l’agronomie. Ça ne leur plaît pas toujours… et Testard ne se gêne pas pour me renvoyer à mes livres.

— Vous vivez toute l’année à Hautfort-le-Vieux ?

— Toute l’année.

— Vous ne voyagez jamais ?

— Jamais.

— Oh ! vous devez vous ennuyer mortellement, car, à votre âge, on a… des curiosités, des aspirations…

Madame Loiselier attendait une réponse mi-sentimentale, mi-galante, une allusion aux tristesses de la solitude, aux félicités espérées de l’amour.

— Voilà précisément ce qu’une dame, une Parisienne, me disait aujourd’hui… Et, quand je lui ai répondu que j’étais parfaitement heureux dans mon trou, elle m’a regardé d’un air de compassion.

— La dame du Chêne-Pourpre ? Celle qui doit acheter les Trois-Tilleuls ?

Augustin s’écria vivement :

— Vous la connaissez ?… Une jeune femme très brune, mince, pâle, avec de grands yeux… N’est-elle pas Italienne ?

— Je ne la connais pas du tout. Ces messieurs ont parlé d’elle.