Page:Tinayre - La Maison du péché, 1941.djvu/194

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repentir du coupable réjouit les anges plus que la persévérance des justes. Je reconnais dans la vie passée de votre fils, et même dans son état présent, des marques éclatantes de la prédilection divine. C’est miracle que l’esprit de curiosité et la fausse science n’aient pas ébranlé sa foi ; c’est miracle que la volupté n’ait pas engourdi sa conscience… Remettez-vous, madame, et permettez-moi de vous dire encore ce que disait un saint évêque à la mère douloureuse d’Augustin : « Il est impossible qu’un fils pleuré avec de telles larme périsse jamais. »

Ainsi, et plus longuement, M. Forgerus exhorta Mme Angélique. Elle était calme, lorsqu’il la quitta en disant :

« Demain, ce soir peut-être, j’amènerai votre fils à vos genoux. »

Il monta l’escalier du pavillon, comme à l’assaut. M. de Chanteprie, assis devant le secrétaire ouvert, lisait une lettre, aux derniers reflets du jour.

« Je vous avais laissé en bonnes dispositions, dit affectueusement l’ancien précepteur. Vous avez réfléchi, vous avez prié : je suis certain que vous avez l’esprit plus à l’aise… Votre mère a prié, elle aussi ; et elle attend… Comprenez-vous ? »

Le jeune homme resta muet.

« Vous ne voulez pas la voir ?… Elle est bien malade. L’âme demeure lucide et vaillante, mais le corps sera bientôt consumé… Connaissez-vous son état ?

— Je le connais.

— Et la vie de votre mère vous paraît de moindre importance que le prétendu bonheur d’une étrangère ?

— J’ai adoré ma mère, de tout mon cœur d’enfant… Mais depuis tant d’années, elle s’est fait une vie à part si loin de moi qu’elle m’inspire plus de respect que de tendresse. Je me suis accoutumé à trouver… ailleurs… l’affection…

— Alors ?…

— Me conseillez-vous de mentir à ma mère, pour prolonger sa vie ?

— Mentir, non ! dit Forgerus consterné, mais, après votre accueil de ce matin, j’avais cru que je pouvais répondre de vous… Augustin, votre figure, votre embarras me font soupçonner…

— Lisez… Vous comprendrez mieux, peut-être, le trouble où je suis. »

Forgerus prit la lettre, – une ardente supplication, l’inimitable