Page:Tinayre - La Maison du péché, 1941.djvu/44

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Éternel combat, dont les vieillards ne se souviennent pas sans épouvante. Dans le mariage, comme dans l’amour illégitime, la femme est l’ennemie de l’homme, et le saint qui pèche sept fois par jour, pèche six fois à cause d’elle.

« Ne vous trompez pas, mon enfant, sur la nature et l’issue de ce combat mystérieux dont je vous parle. Il ne s’agit pas seulement du conflit entre la passion et le devoir, entre la chair et l’esprit. Par une bénédiction spéciale, vous n’avez pas connu ces luttes grossières où succombent presque tous les jeunes gens de votre âge. La tentation ne s’est pas approchée de vous qui ne l’avez point cherchée. Ne vous enorgueillissez pas d’une vertu qui ne vous appartient pas en propre, puisque vous la tenez toute de Dieu. Ni le vice brutal, ni la fausse tendresse, plus dangereuse mille fois, n’ont cueilli les prémices de votre jeunesse. Remerciez Dieu, qui vous a tant aimé !

« Aujourd’hui, la femme entre dans votre vie, sous l’aimable et rassurant aspect d’une jeune fille chrétienne. Faut-il vous fier entièrement à ces apparences de sagesse, de prudence, de douceur, qui vous enchanteraient plus encore que la passagère beauté ? Et ne faut-il pas vous défendre contre cette beauté même ?… Prenez garde, mon enfant, que les charmes de votre fiancée ne vous emportent à quelque excès d’affection qui serait préjudiciable à tous deux, en dénaturant le caractère du mariage ; prenez garde d’aimer la créature autant que Dieu, ou de ne point l’aimer en Dieu. Redoutez ces ruses de la tendresse féminine, ces jalousies, ces prières, qui, sous couleur d’amitié conjugale, incitent l’homme à une espèce d’idolâtrie non moins criminelle que celle des païens. Ne mettez point sur l’autel intérieur de votre âme un être pécheur comme vous, mortel comme vous. Aimez votre femme et n’adorez que Dieu. L’homme est le chef de la femme. L’autorité lui appartient, autorité réglée par la justice et tempérée par l’affection. Vous devez gouverner votre épouse, mon cher Augustin, la maintenir dans son devoir, la défendre contre les tentations, la protéger contre sa propre faiblesse. Vous êtes responsable de son salut, puisque vous êtes son chef, puisqu’elle ne doit que vous obéir et vous suivre. Mais comment la gouverner, si vous ne savez pas vous gouverner vous-même ? comment la conduire, si vous vous égarez ? comment la reprendre, si vous cédez à ses caprices, à ses larmes, à ses caresses ?… Elle sera vertueuse et soumise, direz-vous. Hélas ! elle sera toujours femme, et sa beauté, sa vertu même, sa