Page:Tinayre - La Rancon.djvu/125

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« Je dirai tout cela à mon fils, quand il sera un homme », pensait-elle.

Et elle ajoutait :

— Qui donc égale mon Étienne ?… Avec lui, que n’aurai-je pas fait ?

Ils entrèrent pour déjeuner au restaurant des Buttes-Chaumont. On les servit dans un salon tout en vitrage qui dominait le parc déclinant, étageant ses verdures, ses allées tournantes. Devant eux, le panorama de Paris s’étendant jusqu’à la ligne ondulée de l’horizon, jusqu’aux lointaines collines bleues qu’Étienne nommait à son amie. Une brume pesait sur la ville, et les monuments émergeaient comme des vaisseaux à l’ancre sur la mer pétrifiée des toits. Des nuages filaient, laissant traîner de grandes ombres qui couvraient parfois tout un côté de la cité. Le vent les emportait. Le ciel balayé resplendissait ; puis, de nouvelles armées de vapeurs s’avançaient de l’ouest à l’est, et l’aspect du paysage changeait à chaque minute.

— Voyez, dit Jacqueline en souriant, tout le monde me prend pour votre femme… Si nous ne nous disions pas vous

Elle hésita. Étienne devina sa pensée.

— Nous avons cette superstition du vous, en-