Page:Tinayre - La Rancon.djvu/162

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vous savez que c’est un peu mon œuvre. Nous avons fouillé tous les magasins anglais pour trouver cette mousseline… N’est-ce pas, c’est réussi ? Mais l’étoffe de Liberty ne vaut pas celle de la nature.

Jacqueline rougit un peu.

— Vous êtes content ? Eh bien, vous ferez mon portrait. Oui, vous me peindrez dans ce costume. Qu’en dites-vous, monsieur Chartrain ?

— Je dis que Moritz a de la chance, répondit Étienne en s’efforçant de sourire.

Le peintre examinait Jacqueline comme il eût regardé un tableau :

— Vous êtes pâlotte, ce soir, lui dit-il affectueusement…

— Je suis un peu lasse. Les orages de ce mois m’ont énervée, dit-elle avec douceur. Pourtant je suis venue et je chanterai, pour faire plaisir à Suzanne.

Chartrain, le cœur serré, contemplait cette pâleur touchante de Jacqueline, la nacre qui cernait ses yeux, le pli triste de sa jolie bouche. « Pauvre petite, pensait-il… Et elle doit chanter ! » Il eût voulu la consoler, l’exhorter, multiplier autour d’elle les témoignages muets d’une tendresse toujours en éveil. Mais les sièges suffisant