Page:Tinayre - La Rancon.djvu/205

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— Écoute, je serai plus prudente. Tu ne souffriras plus par ma faute, et peut-être, avec le temps, deviendrai-je parfaite, pareille à ton rêve… Parfaite ! je le serais déjà, si j’avais eu le bonheur de te rencontrer, de n’appartenir qu’à toi seul et toujours, d’être, non pas une maîtresse furtive et clandestine, mais ta femme, et une tendre et fidèle femme, crois-le bien.

— Ma femme !

Il secoua la tête comme pour fuir l’obsession d’un rêve triste.

— Ma femme !… Ah ! quelle vie eût été la nôtre ! Chère petite, ta présence aurait chassé les tristesses stériles. J’aurais travaillé, allègre, et je ne serais point le Chartrain inquiet et obscur qui a semé toute sa vie sans récolter et dédaigne les moissons tardives. Toi, ma femme ! Vivre auprès de toi, dans la sécurité d’un amour que rien ne menace… Ah ! ne parlons pas de cela… Il est vrai, reprit-il, il est vrai que j’étais fait pour cette vie de travail et de tendresse. J’ai toujours eu la nostalgie du foyer. Je suis mal à l’aise dans les complications sentimentales et les mystères des liaisons irrégulières parce que je suis l’homme de la règle, créé pour la vie simple, les routes droites. J’aime ce qui est sûr et définitif.