Page:Tinayre - La Rancon.djvu/263

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honnête que vous. Rester vertueuse est encore le meilleur calcul qu’on puisse faire. Rien ne tourmente et n’abîme une femme comme la passion.


Vers minuit Chartrain s’en alla seul avec Moritz dans la nuit brumeuse. Le peintre l’entraîna dans une longue promenade, par un affectueux désir d’apaiser le trouble qu’il devinait.

Il parla de Jacqueline, non plus avec ce léger dédain qui naguère avait ému la jalousie d’Étienne, mais avec une sympathie nuancée de respect.

— Elle a bien changé depuis trois ans, dit-il. Comparez la Jacqueline que nous avons connue et celle que nous quittons. Ce n’était pas Vallier, certes, qui pouvait la modifier ainsi. Quelque chose a traversé la vie de cette femme.

— Moritz ! Il n’y a rien dans sa vie qui ne soit noble, pur et avouable. Je n’ai pas reçu ses confidences, mais j’en suis sûr, entendez-vous, j’en suis sûr.

— Oh ! fit le peintre, je suis certain que madame Vallier mérite toute notre estime… Mais je tiens à mon hypothèse. Cette femme a connu l’amour et la douleur, j’en jurerais.

— Et quand cela serait ?… Ah ! vous ne seriez